Image reproduite avec l'aimable autorisation de The Astronauts

Witchfire est un rogue-lite à la première personne conçu pour ceux qui n'aiment pas les rogue-lites

80 Level |
26 octobre 2022
Né en Pologne en 1971, Adrian Chmielarz a intégré l'industrie du jeu vidéo en 1992, année à laquelle il a cofondé avec Grzegorz Miechowski la compagnie de développement et d'édition Metropolis Software, au sein de laquelle il travaillait principalement sur des jeux d'aventure. Dans les dix années qui ont suivi, Adrian a codéveloppé et édité des jeux tels que Teenagent, Katharsis et Gorky 17 (alias Odium). En 2002, après avoir quitté Metropolis, il a créé le studio de développement People Can Fly, connu pour la série Painkiller et Bulletstorm.

Dix ans plus tard, en 2012, Adrian a quitté People Can Fly pour cofonder un troisième studio indépendant, The Astronauts, dont il est aussi le directeur créatif. C'est là qu'en 2014, il a développé et édité le premier titre du studio, le jeu d'aventure à la première personne The Vanishing of Ethan Carter. L'équipe travaille actuellement sur Witchfire, un jeu de tir à la première personne de dark fantasy dans le style rogue-lite. Créé avec l'Unreal Engine, le titre promet d'offrir aux joueurs une expérience exigeante, mais gratifiante, avec plusieurs chemins menant à la victoire.
Witchfire est un rogue-lite conçu pour plaire à ceux qui détestent les rogue-lites. Pour en apprendre plus sur le développement du jeu de tir à la première personne à venir, nous nous sommes adressés à Adrian Chmielarz, directeur créatif et cofondateur de The Astronauts, et nous lui avons posé des questions sur le développement de Witchfire, sur l'utilisation de la photogrammétrie pour obtenir des visuels époustouflants, sur l'exploitation du moteur audio de l'UE et plus encore.
 

Comment avez-vous lancé Witchfire et quel était votre projet de départ ?

Adrian Chmielarz, directeur créatif et cofondateur de The Astronauts :
Witchfire est un jeu de tir à la première personne de dark fantasy qui a débuté sous la forme d'un jeu de survie SF. Très honnêtement, je ne sais plus pourquoi ni comment nous avons changé de direction, mais ce n'est pas parce que l'idée de départ posait problème. Le travail effectué sur le prototype était même plutôt amusant. Mais nous nous sommes naturellement réorientés vers la dark fantasy.

C'est peut-être lié à notre passif sur Painkiller, qui était un jeu plein de démons et de monstres. Ou à l'énorme influence de Dark Souls sur notre manière d'envisager le gameplay, l'histoire et les visuels. Ou peut-être que The Witcher a éveillé en nous le désir de puiser dans la mythologie slave. C'est peut-être pour ces trois raisons à la fois, mais quoi qu'il en soit, quand nous sommes passés du survival SF au shooter dark fantasy mêlant armes à feu et magie, nous nous sommes immédiatement sentis à l'aise.

Pouvez-vous nous en dire plus sur l'univers du jeu et le scénario ?

Adrian Chmielarz : L'histoire se passe dans un monde parallèle sombre où les sorcières existent réellement et où elles sont maléfiques, tout comme l'église qui les combat.

Notre héros est un prédateur (Preyer) ; c'est le nom donné par l'église à un certain type de chasseurs de sorcières. Modifié à l'aide de la magie dans les donjons du Vatican, c'est un guerrier puissant, mais il a besoin d'un apport constant en feu occulte (Witchfire), une forme d'éther corrompu constituant le cinquième élément que les sorcières utilisent pour pratiquer la magie et vivre. C'est ce qui le pousse à parcourir le monde et chasser des sorcières, pour récupérer leur feu occulte et survivre.
Image reproduite avec l'aimable autorisation de The Astronauts
Qu'est-ce qui faisait de l'Unreal Engine l'outil adapté pour Witchfire ?

Adrian Chmielarz : Ça a été un choix évident pour deux raisons. Premièrement, nous pensons qu'il est absurde pour un studio indépendant de ne pas utiliser un moteur de jeu [déjà existant]. Et l'Unreal Engine est un moteur établi et incroyable à bien des égards. Deuxièmement, nous travaillons avec l'Unreal Engine depuis que nous avons fait Gears of War PC, qui était le premier projet de People Can Fly avec Epic, et bien sûr, Bulletstorm. Cela fait donc 15 ans que nous utilisons ce moteur.

Vous décrivez Witchfire comme un rogue-lite conçu pour plaire à ceux qui détestent les rogue-lites. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Adrian Chmielarz : C'est une bonne question, car pour ceux qui détestent les rogue-likes, les rogue-lites leur ressemblent déjà trop. En gros, beaucoup de gens n'aimaient pas perdre toute leur progression quand ils mouraient avec pour seule récompense de mieux connaître les mécaniques de jeu. C'est comme ça que les rogue-lites sont nés. Ils offrent une forme de continuité. Vous conservez une partie de ce que vous avez gagné pendant la session, vous ne perdez pas tout.

Nous voulons approfondir ça. Par exemple, dans la plupart des rogue-lites, vous ne pouvez pas apprendre à maîtriser les affrontements, car ils sont aléatoires. Vous ne pouvez pas les mémoriser comme un tracé de course automobile. Nous travaillons sur cet aspect, tout en essayant de conserver le côté aléatoire et nouveau de chaque partie. Ça semble paradoxal et impossible, mais nous avons bel et bien trouvé une solution.

Plus important encore, les gens pensent que les rogue-lites exigent une grande dextérité. Nous voulons changer cette idée. Bien sûr, vous serez copieusement récompensé si vous contrôlez parfaitement votre personnage et que vous visez juste, mais nous souhaitons aussi offrir d'autres options. La difficulté n'en sera pas réduite pour autant. Mais le défi proposé sera différent.
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Quelles sont les principales mécaniques de jeu ?

Adrian Chmielarz : Pour moi, un bon jeu de tir est un bon jeu de réflexion déguisé. Même si on revient aux origines avec Doom 2 ou Quake, ces jeux contenaient tout un tas de questions auxquelles le joueur devait répondre. Comment traverser une salle pleine d'ennemis difficiles ? Comment affronter plusieurs ennemis en même temps ? Comment bien utiliser les power-ups ?

Les meilleurs shooters ne se résument pas à des exercices de tir et d'esquive. Votre cerveau doit travailler davantage que vos doigts. À mon avis, c'est ça, l'ingrédient secret.

L'une des plus grandes difficultés dans un rogue-lite est de bien doser la vitesse et de définir le bon rythme. Comment l'avez-vous surmontée ?

Adrian Chmielarz : Grâce à des milliers de détails, des dizaines d'années d'expérience et des tests incessants. Je ne plaisante pas, c'est véridique. Il n'y a pas de recette magique.

Pour vous donner un exemple, la mise en mémoire de l'action est très importante. Imaginez que vous êtes en plein combat, vous voyez l'ennemi, mais vous n'avez plus de munitions. Vous rechargez votre arme, vous visez et vous tirez. C'est le b-a-ba, pas vrai ? Mais si vous vous précipitez, vous pourriez appuyer sur la touche de visée trop vite, avant la fin de l'animation de rechargement. Dans ce cas, après le rechargement, l'animation de visée ne s'affichera pas et vous perdrez une seconde à vous demander ce qui vient de se passer. Avez-vous appuyé sur la touche trop tôt ? Avez-vous appuyé trop timidement et l'action n'a pas été enregistrée ? S'agit-il d'un bug ?

La solution, c'est la mise en mémoire de l'action. Le jeu se souvient que vous avez appuyé sur la touche de visée, attend la fin de l'animation de rechargement et met automatiquement votre arme en mode visée. Évidemment, la mise en mémoire n'a rien de nouveau. Elle est très répandue dans les jeux de combat, par exemple. Mais comme je le disais, c'est l'une des myriades de choses à prendre en compte pour réduire la friction et créer un jeu fluide.
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Comment avez-vous conçu les niveaux de Witchfire ?

Adrian Chmielarz : Comme d'habitude, nous sommes partis de formes basiques pour arriver à des lieux détaillés et texturés. Mais la particularité de notre approche, c'est que nous faisons en sorte que chaque zone du jeu soit facilement reconnaissable. Notre priorité n'est pas de créer quelque chose d'héroïque ou des éléments de décor renversants. Nous cherchons plutôt à ce qu'ils soient uniques. Voilà comment nous expliquons la chose aux nouvelles recrues du studio : "Imaginez que vous êtes sur une carte JcJ. Vous êtes blessé et voulez dire à un ami de venir vous soigner. Qu'allez-vous lui dire pour qu'il comprenne rapidement où vous êtes ?"

Ça peut paraître simple, mais c'est loin de l'être. "Beau" et "facilement reconnaissable" ne sont pas du tout les mêmes choses. Vous pouvez avoir une magnifique forêt next-gen, et après ? Comment allez-vous faire comprendre à votre ami où vous êtes ? "Hé, je suis à côté des arbres ?" Ça ne marche pas. Par contre, si vous ajoutez une cabane de chasseur dans la forêt ou une clairière parsemée de squelettes de cerfs, là, on vous retrouvera facilement.

On fait ça pour aider les joueurs à se repérer dans l'espace en 3D. Si vous demandez votre chemin, certaines personnes vous diront de faire 100 mètres dans cette direction, de tourner à gauche et de continuer 200 mètres. D'autres vous diront d'aller tout droit, de tourner à gauche à la station-service et de vous arrêter juste après le bureau de poste. Le fait d'avoir des éléments du monde facilement reconnaissables permet au deuxième type de personnes de comprendre la disposition de nos niveaux en 3D.

Pouvez-vous nous parler de votre méthode de photogrammétrie ?

Adrian Chmielarz : C'est la même que dans The Vanishing of Ethan Carter. On prend des dizaines de photos d'un objet sous tous les angles, on les met dans un logiciel spécialisé et on le laisse travailler jusqu'à ce qu'il nous sorte des modèles 3D de haute qualité entièrement texturés.

C'est l'idée de base, en tout cas. En réalité, il faut intervenir à chaque étape. Le logiciel et les appareils photo font des progrès, mais il faut toujours un artiste graphique pour retravailler les scans 3D, corriger les photos, peaufiner le modèle final et en rendre une version low-poly.

Mais vous savez quel est notre plus gros problème ? Les graffitis. C'est très dur de trouver un vieux bâtiment abandonné, un château en ruines ou une usine désaffectée qui ne soient pas couverts de graffitis. Alors, la moitié du travail pour améliorer les textures des scans consiste à supprimer les graffitis.
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Comment le moteur audio de l'Unreal Engine vous aide-t-il à renforcer l'atmosphère du jeu ?

Adrian Chmielarz : J'ai posé la question à Jaz, notre ingénieur du son, et voici sa réponse : "On utilise le plug-in Audio Modulation pour le mixage et il est incroyable ! On a également une hiérarchie de classes de sons qui nous sert de structure d'organisation, vers laquelle on redirige les sorties de tous les sound cues. On travaille également avec Quartz. On s'en sert principalement pour synchroniser différents éléments musicaux de façon adéquate, mais on l'a aussi exploité pour créer les sons d'armes automatiques."

Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez conçu la bande-son du jeu ?

Adrian Chmielarz : Il existe plusieurs approches quand on crée une bande-son. Sera-t-elle simplement ornementale ou narrative ? Dynamique ou statique ? Nous avons choisi la deuxième option dans les deux cas. Ce qui veut dire que les morceaux ont autant d'importance et de caractère que les visuels ou le gameplay. Et pour y parvenir, nous avons choisi une approche traditionnelle et non dynamique.

Pour être précis, il y a un certain niveau de dynamisme, car les morceaux joués diffèrent selon l'intensité des combats, ou s'il s'agit d'un passage entre des combats. Mais les compositions sont statiques, elles sont juste jouées en boucle.
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Avez-vous eu recours à des astuces particulières pour renforcer le niveau d'immersion du jeu ?

Adrian Chmielarz : Nous avons consacré énormément de temps à la narration contextuelle. Quelle est l'histoire de ce lieu ? Que s'est-il passé ici et comment le transmettre au joueur ? Nous avons fait en sorte qu'on sente que les lieux abandonnés étaient autrefois habités, et que les proportions soient justes du point de vue du joueur, pour qu'il ne sente pas minuscule.

En plus de ça, nous avons appliqué toutes les petites astuces et solutions apprises au fil des ans. Comme s'assurer que le vent est plus fort qu'il ne devrait l'être, car quand c'est bien fait, on a l'impression que les arbres sont des objets statiques quand le joueur se déplace.

Pouvez-vous également nous décrire le processus de création des personnages ?

Adrian Chmielarz : Il est un peu spécial, car nous n'avons pas de character artist. Plus précisément, nous avons un incroyable artiste, Michał Kosieradzki, qui est capable de créer des personnages, il en a d'ailleurs fait quelques-uns pour le jeu, mais c'est aussi notre concepteur d'effets spéciaux principal, et je vous laisse imaginer la quantité d'effets qu'il y a dans un FPS de fantasy plein d'armes et de magie. Il fait aussi toute la végétation du jeu, donc autant dire qu'il est plutôt occupé.

Nous nous sommes donc adressés à certains des plus grands character artists polonais et nous leur avons demandé de créer un monstre ou deux pour le jeu. Witchfire parle à beaucoup de gens, nous avons donc réussi à collaborer avec des artistes d'exception venant de studios tels que CD Projekt et Flying Wild Hog. Ils ont su respecter le style global du jeu pour assurer la cohérence, tout en apportant leur touche personnelle à leurs créations. On a donc des ennemis qui sont faits dans le même moule, pour ainsi dire, mais dans des esprits différents.
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Comment avez-vous conçu les armes et leurs effets ?

Adrian Chmielarz : L'utilisation des armes est très importante à nos yeux. Votre arme ne vous quitte jamais, alors les mouvements qui lui sont associés et son comportement doivent être parfaits. Nous avons donc mis l'accent sur quatre aspects : les animations, les sons, les effets et le retour.

Intéressons-nous aux sons, par exemple. Contrairement à ce que les gens pensent, il est relativement simple de créer des sons d'armes puissants et ronds. De nombreuses bibliothèques d'armes en proposent. La vraie difficulté, c'est de faire une arme avec un super son dont vous ne vous lasserez pas après l'avoir entendu 50 000 fois. Pour résoudre le problème, nous avons réservé les sons plus puissants aux grosses armes avec peu de munitions, comme les fusils de précision, et les sons moins puissants, voire faibles, aux armes que le joueur utilise souvent.

L'autre raison qui nous pousse à attribuer des sons moins puissants aux armes de base, c'est qu'il faut laisser de la marge pour un crescendo lors des coups à répétition. Imaginez une arme très simple qui inflige de plus en plus de dégâts à chaque tir à la tête. On voudra commencer par un son intéressant, mais faible, pour qu'il augmente à chaque tir. Si la première balle produit déjà un son puissant et super intense, alors la suivante sonnera comme un soleil qui explose et ce n'est pas idéal.
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En quoi la subvention Epic MegaGrant que vous avez reçue a-t-elle affecté le développement du jeu ?

Adrian Chmielarz : C'était génial de recevoir l'aide financière fournie par l'Epic MegaGrant, mais ce qui l'était tout autant, c'était de savoir qu'en voyant notre jeu, Epic l'avait jugé digne d'intérêt. Ça a vraiment boosté notre confiance. Nous arborons la MegaGrant comme une médaille d'honneur.

Quel est votre objectif actuel ?

Adrian Chmielarz : L'objectif est d'enfin sortir le jeu, en commençant par un accès anticipé. Ce sera une première pour nous, mais le rogue-lite s'y prête parfaitement, car l'avis des joueurs est crucial pour bâtir l'expérience finale.

Ce n'est toutefois pas une excuse pour sortir un jeu buggé ou mal dégrossi. Par nature, les joueurs s'attendent à ce qu'il manque du contenu ou des fonctionnalités dans un jeu en accès anticipé, mais je pense qu'ils ne tolèrent plus les bugs et les durées de jeu écourtées. Nous ne sortirons donc rien avant d'en être entièrement satisfaits, c'est aussi simple que ça. Mais nous espérons atteindre le stade de l'accès anticipé dans quelques mois. Nous ne sommes plus très loin.

Nous avons ce que nous appelons les mercredis Witchfire, où nous tweetons une info cool tous les mercredis. Twitter est la meilleure plateforme pour se tenir informé sur Witchfire, en attendant l'ouverture de notre Discord.

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